Fin octobre 2022 une jeune femme victime d’un viol à l’hôpital Cochin porte plainte pour mise en danger d’autrui. Cette agression a été commise alors que la victime âgée de 34 ans avait été admise en état d’ivresse aux urgences à la suite d’un traumatisme crânien. L’enquête précise que le viol avait eu lieu dans son box par un individu d’origine étrangère sous le coup d’une (OQTF) obligation de quitter le territoire français non exécutée.
Cet incident nous conduit à nous interroger sur les dangers encourus par les patients hospitalisés. Le personnel médical n’en est pas pour autant épargné. Les malaises qui affectent soignants et malades se cumulent et augmentent la mise en danger qui menace les uns et les autres. La surcharge des établissements de soins,le manque de locaux adaptés, de personnel mais aussi de médecins créent un climat préjudiciable aux malades et au personnel soignant.
UN MANQUE DE MOYENS PRÉJUDICIABLE AUX PATIENTS
Si le scandale des urgences n’a pas besoin d’être souligné, il se traduit parfois par des situations difficilement admissibles. Ainsi le 31 août 2022 un homme de 81 ans décède aux urgences des hôpitaux universitaires de Strasbourg après avoir passé une vingtaine d’heures sur un brancard dans une zone de soins. On apprend que l’établissement en a informé les autorités compétentes qui n’ont pas répondu. Une cour d’appel qui, pour déclarer un centre universitaire coupable d’homicide involontaire à la suite du décès d’une patiente dans le service des urgences, a retenu une violation au règlement intérieur de l’hôpital imposant la présence d’un médecin senior dans chaque unité fonctionnelle de ce service. Ainsi une patiente n’avait pu être examinée par un médecin sénior tant lors de son arrivée au service des urgences qu’à son retour du service de radiologie. Ce faisant, alors que le diagnostic vital était engagé, l’établissement avait commis une faute en lien de
causalité certain avec la mort de la victime (Cassation 9 mars 2010). Retard dans l’établissement d’un diagnostic permettant la prise en
charge adaptée d'une méningite encéphalite-herpétique lors de l’admission au service des urgences Cour d’appel de Nancy 29 décembre 2022).
La surcharge des services contraint les praticiens à limiter le temps consacré à l’examen des malades. Ces cas ne sont pas isolés. Un bon nombre de plaintes ne sont pas enregistrées. Les victimes préfèrent ne donner aucune suite craignant de se perdre dans les méandres de la procédure judiciaire et de supporter les frais d’un procès aux résultats aléatoires. Le manque de personnel ne peut constituer un cas de force majeure exonératoire de responsabilité. Il en est de même en cas de grève mais le préfet peut dans cette hypothèse prendre un arrêté de réquisition des médecins et personnel soignant. D’après une étude parue le 17 novembre 2022 cette situation affecte profondément la santé physique (62 %) et psychologique (81 %) des patients victimes de la dégradation de leur prise en charge. L’hôpital peut aussi être source de danger lorsque des rendez-vous sont refusés ou annulés. Le manque de médecins en est souvent la cause mais cette situation est mal supportée par les français.
LES VIOLENCES EN MILIEU HOSPITALIER
L’observatoire des violences en milieu hospitalier (ONVH) a été créé par une circulaire du 11 juillet 2005 pour recenser les actes de violence dans les hôpitaux publics.
Les enquêtes diligentées par cet organisme indiquent que tous les établissements de soins sont exposés à des actes de violence. Pour l’année 2009 on compte 4 142
signalements et 5 090 en 2010 soit une augmentation de 7 % en un an. Ce taux a dû encore s’accroitre dans une société devenue de plus en plus violente…
Ces estimations comptabilisent les actes de violence physique, verbale, psychologique directe ou indirecte. Dans la majorité des cas il s’agit d’atteintes aux personnes.
Des comportements violents de plus en plus fréquents |
Ces comportements ne sont que très rarement sanctionnés. Les victimes victimes hésitent la plupart du temps à porter plainte estimant à tort ou à raison que leur plainte sera classée sans suite.
LES CAUSES DES ACTES DE VIOLENCE
Même en l’absence de dommage en résultant ce sont les conditions d’accueil dans les hôpitaux qui provoquent les réactions violentes les
plus fréquentes. Le patient considéré désormais comme un usager conteste l’organisation du service et parfois la décision médicale en se fondant sur des informations puisées sur le net ou recueillies auprès de personnes mal informées. Certaines pathologies voire l’utilisation abusive d’alcool peuvent expliquer des réactions agressives. Pour faire face à l’agressivité de certains patients des stages de self-défense proposés au personnel soignant du CHU de Limoges connaissent un réel succès.
MISE EN DANGER DES SOIGNANTS
À Nancy le syndicat CGT santé et action sociale a porté plainte contre X dénonçant l’inaction des autorités face à une situation qui devient de plus en plus compliquée pour les salariés et les usagers. La fatigue occasionnée par le manque de personnel et l’afflux de malades ne permettent plus à ces derniers de bénéficier de soins attentifs et adaptés. Bon nombre de soignants se plaignent de surmenage ou burnout selon le terme régulièrement employé. La plainte de ce syndicat a bien peu
de chances d’aboutir dès lors qu’il convient de prouver la réalité du burnout et d’en identifier le responsable. Sur le premier point il n’existe pas de définition du burnout. Il se caractérise par une fatigue excessive, une anxiété ou un manque de sommeil.
Le burnout est difficile à prouver |
Encore faut-il le constater et le relier le cas échéant aux conditions de travail pour bénéficier d’une meilleure indemnisation. Faire reconnaître l’imputabilité du surmenage aux services est chose d’autant plus délicate que le médecin ne peut se prononcer sur des conditions de travail qu’il ne connait pas. Il doit se contenter de décrire l’état de son patient (Cour d’appel de Toulouse 16 décembre 2022). Faire valoir ses droits devient très difficile. Non seulement, comme nous venons de le constater, le burnout doit être établi mais encore faut-il pouvoir en identifier le responsable. La responsabilité du chef d’établissement qui a pour obligation de veiller à la sécurité des salariés peut être retenue en cas de carence de sa part mais, sauf faute grave avérée, sa mise en cause a bien peu de chance d’aboutir. La jurisprudence n’a pas, à ce jour, clairement reconnu le burnout.
Cependant un arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation en date du 13 mars 2013 casse une décision de cour d’appel qui avait justifié un licenciement pour absence prolongée d’un salarié et ce, sans rechercher si cette absence n’était pas due à un stress ou un épuisement professionnel. Cette question fait aujourd’hui l’objet de nombreux colloques invitant le législateur à mieux définir la notion de burnout et à en tirer les conséquences juridiques.
▶ CONCLUSION Cependant un arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation en date du 13 mars 2013 casse une décision de cour d’appel qui avait justifié un licenciement pour absence |